mardi 28 février 2023


MALADIES ORPHELINES

OU

 LA VALEUR TRAVAIL 

CONTRE L’INTERET GENERAL

 

Par Alain Vidal

 


 Ce qui vaut pour les maladies rares l’est tout autant pour la satisfaction des besoins fondamentaux des populations.

A Nantes dans ma classe de CM1, une petite fille était atteinte d’une maladie, orpheline, le syndrome de Crigler-Najjar, maladie génétique du foie, qui se caractérise par l'accumulation anormale de bilirubine dans l'organisme. D’où un teint jaunâtre permanent évoquant une jaunisse.

Souvent absente, elle devait rester allongée dans un lit, nue sous des lampes à lumière bleue spéciale. Elle ne pouvait jamais rester dormir chez des amis, encore moins partir en vacances

Pour son enfant atteint de la même maladie, un ingénieur américain avait conçu un lit pliable et transportable. Aucune entreprise n’était preneuse pour le commercialiser, la rentabilité étant nulle avec dans le monde quelques centaines seulement de cas dont 20 en France…

Pour pallier à ce manque, j’ai organisé une collecte. Les enfants, les parents de l’école y ont participé, ainsi que les commerçants du quartier. Grâce à la somme réunie, cette enfant a retrouvé une certaine autonomie, tout à la joie de pouvoir aller à des anniversaires et d’effectuer des séjours prolongés au bord de la mer, grâce à ce lit qui l’accompagnait partout.

Avec une monnaie non circulante alignée sur ces véritables richesses que sont les matières premières offertes gratuitement par notre planète, pour la fabrication de notre environnement physique, les maladies orphelines…de chercheurs et de traitements, ne le seraient plus.

Plutôt qu’une monnaie non circulante alignée sur les espaces bio-productifs, sources de toute vie, l’économie de marché nous impose une monnaie bancaire.

Une monnaie (alignée sur le temps de travail) représente une mesure des richesses limitant dangereusement la satisfaction des besoins fondamentaux de l’humanité. Une mesure qui permet d’échanger une partie des productions destinées à la consommation populaire, contre des productions réservées aux revenus supérieurs.

Comme il est impossible d’échanger en unité de masse, des   pommes de terre contre des diamants, le temps, est le seul équivalent universel de l’économie de marché. Et ce, depuis l’édification du premier Etat, fondé sur l’économie de marché exigeant l’inégalité des revenus, il y a 5000 ans, en Mésopotamie.

Avec le remplacement des hommes par les machines, les prix baissent par unité de marchandises, de par la réduction du   travail humain. Le progrès technologique entre les mains d’une minorité de propriétaires de moyens de production, sert avant tout à gagner des marchés. Cependant, pour compenser la perte de profit par unité, on augmente le volume de la production. Si bien que pour une même valeur marchande, pour un même profit, à quelques années de distance, on gaspille davantage de matières premières et d’énergies fossiles.   

  La priorité du marché étant le profit, si une production n’est pas suffisamment rentable, des besoins fondamentaux ne seront pas satisfaits alors même que l’écosystème pourrait y répondre.  

 Le moins cher pour le consommateur « coûte très cher » à la planète, avec pour conséquences : déforestation, engrais chimiques, pollution, crise climatique, montée des eaux, maladies, épidémies et accroissement exponentiel des maladies émergentes.

La lutte au sommet pour la plus grande fortune épuise les hommes et les sols.

En France, plus 3 millions de maladies rares, mais très peu de cas par maladies. Par contre, le marché du cancer est très florissant. Rien que le cancer des poumons, 46363 nouveaux cas diagnostiqués en 2018.

 Institut Curie :

 « La lutte contre le cancer du poumon est un enjeu majeur de santé publique et une priorité ».

Pauline du Rusquec, onco-pneumologue :

 « Prévention, dépistage organisé, innovation… nous devons nous mobiliser sur tous les fronts contre le cancer du poumon, particulièrement meurtrier. Ces dernières années, grâce aux thérapies ciblées, à l’immunothérapie, mais aussi à l’arrivée de nouvelles classes thérapeutiques… la recherche a fait des progrès majeurs. Les résultats prometteurs s’apprêtent à transformer la prise en charge et à changer véritablement la donne pour les patients atteints de cancer du poumon. »

Cependant, en 2016, la campagne de l’ONG Médecins du Monde, contre la cherté des médicaments sera interdite d’affichage public par l’autorité professionnelle de régulation de la publicité (ARPP), jugeant cette action nuisible aux laboratoires pharmaceutiques. On le comprend à la lecture des affiches prévues pour la campagne :

 « Bien placé, un cancer peut rapporter jusqu'à 120 000 € »

« Le cholestérol, un placement à forte rentabilité et garanti sans risque »

« Avec l’immobilier et le pétrole, quel est l’un des marchés les plus rentables ? la maladie »

« Le cancer du sein, plus il est avancé, plus il est lucratif »

« Chaque année en France, le cancer rapporte 2,4 milliards d’euros »

« Seul 1% des français peut se permettre d’avoir une hépatite C »

« 1 milliard d’euros de bénéfice, l’hépatite C, on en vit très bien »

On comprend mieux que ces pathologies fassent l’objet d’une « recherche clinique dynamique et encourageante » pour les patients, certes, mais avant tout et surtout pour les super profits qu’engrangent les multinationales de la santé.

A l’inverse, on ne peut que constater le peu de recherches concernant les maladies rares marquées du sceau infâme de la non rentabilité... 

N’étant pas un facteur de croissance du PIB, la lutte contre les maladies rares n’est pas un enjeu national et encore moins une priorité car elle  n’entraîne pas un accroissement de richesses marchandes, richesses permettant à une infime minorité de la population française, très exactement, 65 milliardaires de s’offrir yachts et jets privés, des suites somptuaires à l’année dans les plus grands palaces, pendant que ceux atteints de maladies rares et leurs aidants, souffrent au quotidien de l’indifférence des ultra riches. Une indifférence qui confine au mépris.

L’enrichissement, la possession de biens matériels onéreux, le recours sur une très grande échelle, aux services à la personne (chauffeur, secrétaire particulier, cuisinier…), font partie du code génétique de ceux qui recherchent la respectabilité et les honneurs.

Dans tous les Etats, le pourcentage d’ultra-riches décorés pour service rendus au pays, est considérable, légion d’honneur et autres signes du devoir accompli !  Et pour cause, cette richesse marchande produite par les premiers de corvées, alimente généreusement par l’impôt, les revenus des grands décideurs politiques du sommet de la pyramide étatique : ministres, présidents, sans oublier les hauts fonctionnaires et leur droit au pantouflage. Des revenus qui peuvent atteindre, en comptant les privilèges qui s’y rattachent, des dizaines de milliers d’euros mensuels.  Pour eux, pas d’attente de plusieurs heures aux urgences… Leur situation leur permettant d’être admis à l’hôpital américain de Neuilly ou encore, à celui du Val de grâce réservé aux personnalités.

Pour ces gens-là, des pensions de retraites dorées supérieures à 10 000 euros mensuels…Pour eux, pas de syndrome musculo-squelettiques et autres syndromes spécifiques, caractérisant les métiers aux activités répétitives effectuées par ceux qui touchent des pensions misérables.

S’insurger contre le prix des médicaments, comme l’a fait Médecins du Monde, c’est très bien, à la condition d’aller voir ce qui se cache derrière le prix. On y découvrira une fausse marchandise : la connaissance. L’économie de la connaissance, ça n’existe pas !

En effet, la cherté d’un traitement, correspond essentiellement aux coûts liés aux activités tertiaires : recherche, publicité, communication, lobbying. Autant d’activités n’exigeant aucune dépense en termes de ressources planétaires. Aucune dépense, puisque relevant d’activités spécifiques à l’atelier cérébral, domaine privilégié des productions immatérielles non mesurables, à l’inverse des biens physiques !

Les services dits marchands transforment le gratuit en payant. Quand on vend un bien matériel, on ne l'a plus. Quand « on vend » un bien immatériel, « le vendeur » le conserve. En réalité, le bien immatériel a été transmis sans que le transmetteur ne le perde. Bien que complémentaires et indispensables l’une à l’autre, mais sans aucune caractéristique commune, les créations cérébrales et les productions manuelles ne peuvent s’échanger.

L’instauration de la monnaie non circulante inaugurerait le passage d’une société en mode Microsoft à une société en mode Linux.

Savoirs et savoir-faire, informations, inventions, procédés technologiques…sortant de l’atelier cérébral, circulant librement alimenteraient une intelligence collective, condition première du rééquilibrage des relations humaines. Les Terriens seraient reconnus dès leur naissance et jusqu’à leur mort, dans une égale dignité. Ni supérieurs, ni inférieurs.

L’éboueur ne pouvant se passer de l’ingénieur et vice versa, nous serions tous coopérateurs. Nous retrouverions une motivation au travail bien fait, au travail d’intérêt général au nom du bien commun.

La crise socio-écologique est due à une monnaie circulante par nature antisociale et anti écologique, une monnaie légalisant l’appauvrissement pour l’enrichissement bien au-delà des besoins fondamentaux. Au grand bénéfice d’une élite addicte au luxe, cette   esthétique de la domination, cette esthétique anti éthique…

Nos technologies font que machines et robots remplacent des centaines, des milliers de travailleurs, de l’ouvrier à l’ingénieur. La valeur travail tant vantée comme unique source des richesses est une imposture. Pour les produits de consommation courante, le travail humain n’existe qu’à dose infinitésimale.

La monnaie non circulante s’annulant à l’obtention du produit désiré, respecterait les hommes et les sols. Le temps économisé par le remplacement des travailleurs par les machines et robots, ne renverrait personne à la case chômage.

Ce temps si précieux serait massivement déversé dans les services : santé, instruction, alimentation, transport…

La recherche ferait un bon extraordinaire, les chercheurs, ne perdaient plus 80% de leur temps à monter des dossiers de financement.

Chacun disposerait, de la naissance à la mort, d’un revenu de 1,6 hectares de surfaces bio productives destinées à nos besoins physiques. Un revenu prélevé sur un budget-Terre de 12 milliards d’hectares bioproductifs. Surface d’où proviennent tous nos biens matériels de nos sphères personnelles et professionnelles. Quant aux services, les activités du tertiaire relevant de l’immatériel sans destruction-transformation de matières premières, ils seront accessible sans carte verte.

Dans les magasins, pour chaque acquisition de biens matériels, le montant serait automatiquement annulé sur une carte verte alimentée chaque année en monnaie-Terre.

Les 10% les plus fortunés de la planète sont responsables de 50% des émissions carbone. Par contre, pour les 50% les plus pauvres, la responsabilité n’est que de 10%.  Comme, les scientifiques le constatent, la surconsommation sans limite de 800 millions n’est possible que dans la sous consommation chronique de la moitié appauvrie, c’est-à-dire, 4 milliards d’’êtres humains !

 Pas question que certains aient le droit de polluer aux dépens d’autrui, ce qui exige l’égalité des revenus. Revenu ne dépassant pas 2 tonnes de CO2 par an et par personne.  C’est la seule et unique condition au retour à la neutralité carbone.

Pour l’humanité, en termes de décès prématurés, les émissions de gaz à effet de serre représentent le premier facteur. Chaque année, depuis fort longtemps, le bilan ne cesse de s’alourdir, l’an dernier, 9 millions de victimes dans le monde, principalement de maladies cardio-vasculaires…en France, 100 000, en Europe, environ 1 million.

Morale :

la pollution augmentant avec le revenu, plus on consomme, plus on pollue, plus on tue. A savoir que, l’empreinte carbone moyenne d’un Français est de 5 tonnes de CO2 par an (source : Agence internationale de l’Energie 2017).

La monnaie-Terre non circulante de mains en mains, annoncerait l’avènement de la démocratie, la vraie, dans le respect des hommes et des écosystèmes, dans le respect des besoins fondamentaux, avec pour seul fil à plomb, la prise en compte des limites de la biocapacité des écosystèmes et la prospérité pour chacun.

Dégradés par l’économie de marché, les espaces aquatiques et terrestres seraient régénérés. La crise socio-écologique dépassée et la santé planétaire revenant, redonneraient aux jeunes générations le sens du travail libéré du surtravail, et l’amour de la vie.

 

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lundi 13 février 2023

 


 

 DE L’OCCUPATION MILITAIRE 

A L’OCCUPATION MONETAIRE



ERNEST BARREAU


80 ANS DE RESISTANCE AU CAPITALISME

 

 

par Alain Vidal

 

 

 

 

                                               Ernest au maquis, deuxième à partir de la droite. 

Son frère est derrière lui.

 



2022, Ernest, dans sa centième année


« A la santé planétaire ! »

le dernier pour la route…

 

 

En 1942, travaillant au mur de l’Atlantique, tu voles des explosifs pour les maquisards. Arrêté par la Gestapo, on perquisitionne chez toi à Rouans. Malin, tu avais caché les explosifs dans une double cloison. Déterminé à rejoindre la résistance armée, tu rejoins le maquis de la forêt de Princé dans le pays de Retz.

Jusqu’à ta mort dans ta centième année, tu as lutté pour faire connaître l’urgence d’une monnaie de paix créée, non sur le malheur des autres et la destruction des écosystèmes, mais sur l’égale répartition des richesses que la planète offre gratuitement à tout un chacun. 

Pourchassé par les nazis, Brecht (écrivain et metteur en scène anticapitaliste),  écrit: 

« La dictature n’est pas le contraire de la démocratie, mais son évolution en temps de crise ».

Comme lui, tu savais que la défaite des nazis n’arrêterait en aucune façon, la guerre économique et son cortège d’inégalités instituées. Sans relâche, tu as fait un formidable travail d’éducation populaire. Expliquant la nature et le rôle d’une monnaie au service de l’enrichissement des uns par l’appauvrissement du grand nombre. 

Une monnaie qui mesure le surtravail forcé inhérent au salariat, à l’esclavage et au servage. Sans ce tribut au vainqueur, ni temples, ni palais ni château féodal, ni hôtels particuliers, ni jets privés, ni rivières de diamants…

Le salarié n’est pas un travailleur libre. Certes il a des droits que n’ont pas les serfs et les esclaves, sauf qu’au-delà des heures correspondant au salaire, la grande majorité du temps effectué dans l’entreprise, l’est gratuitement. Cette survaleur générée par le surtravail, l’employeur l’utilise pour les dépenses de fonctionnement, mais aussi pour le versement des dividendes aux actionnaires.

Offrande aux dieux, dette, profit, corvée, dîme ecclésiastique, péage, dividende impôt, cotisation, amende…depuis l’antiquité, sous des appellations multiples et variées banalisées par la culture dominante et les grands médias, ce concept perdure. Depuis le premier Etat de l’Antiquité, autant de temps perdu à tout jamais pour l’intérêt général.

Autant de prélèvements forcés, de ces contributions épuisant les sols et les hommes. A savoir que le mot contribution de connotation positive et citoyenne a pour racine « tribut », cette charge imposée par les dominants !

En 1932, tu as 10 ans.  Depuis longtemps déjà, dans les usines et dans les champs, le labeur des travailleurs ne cesse de diminuer. 


Un ouvrier à lui seul, produit autant que plusieurs centaines, au 19ème siècle.  

 

                           

                                                             Machine à vapeur 1930


 Les patrons pour conquérir des marchés en vendant moins cher, remplacent les travailleurs par des machines. Le nombre des chômeurs grossit : moins d’argent, moins d’achats, les invendus s’accumulent. Pour maintenir les profits, l’Etat et le patronat décident de réduire l’offre en ordonnant la destruction des invendus.

Tes parents, comme beaucoup, sont stupéfaits. Les gouvernements édictent des lois décrétant l’abattage de millions de veaux, de vaches, de cochons, de chèvres et de moutons…

 

 

 


 Le lait invendu est répandu dans les champs et les égouts... 

Les récoltes sont brûlées. Le monde marche la tête à l’envers. Les gens manquent d’argent alors qu’agriculteurs et industriels en reçoivent pour réduire leurs productions. En France, le ministre de la Marine Marchande, exige que les mailles des filets de pêche soient suffisamment grandes pour que le poisson puisse s'échapper ! Quand cela ne suffit pas, les bateaux sont interdits de sortie un ou deux jours par semaine.  Au Brésil, les locomotives roulent aux grains de café !

En Roumanie, on ira jusqu’à interdire l'emploi de machines agricoles, et on ressortira la faux et la faucille. Les récoltes contenant davantage de surtravail, seront de nouveau considérées vendables avec profit. 

La « Marche des ventres creux contre la faim ».  

Partout dans le monde les sans revenus manifestent. Les files s’allongent devant les soupes populaires. On meurt prématurément de malnutrition. 

Région parisienne, « Du travail et du pain », c'est à ce cri que défilent les milliers de chômeurs manifestant le 10 décembre 1932.  De la banlieue, les « Sans travail » dès 7 heures convergent vers Paris. 



Le 27 juin 1933, l’année de tes 11 ans, près d’un millier d’ouvriers de Loire-Atlantique partent de Saint-Nazaire pour rejoindre Nantes dans le cadre d’une marche contre le chômage et la misère. 

Le cortège est accompagné de cuisines roulantes, de camions d'approvisionnement. On passe la nuit à la belle étoile, et au petit matin, à Nantes, au vélodrome du Petit-Breton, 10 000 personnes acclament les marcheurs. Encadrés par des directions syndicales et des partis réformistes, les travailleurs ne sont pas en mesure de réclamer un revenu aligné sur le travail des machines. En état de choc, les « ventres creux » finiront par accepter de surtravailler plutôt que de mendier ou de dormir dehors. Bien que surtravailler pour survivre ne soit pas travailler pour vivre…


Ton certificat d’études en poche, tu deviens apprenti dans un garage du Pellerin.

Plus grand, en suivant des cours par correspondance, tu seras chef de chantier.

Mais la vie devient plus difficile avec un crise qualifiée faussement d’«économique.» Les gens ont faim. 

Mais de cela, l’Etat et le grand patronat n’en n’ont cure. Le chômage, conjugué à l’interdiction de distribuer, nourriture, vêtements, médicaments, destinés à la destruction… constitue un odieux chantage pour forcer les travailleurs à reprendre le chemin des usines et des champs, avec des salaires au rabais. 

Une vraie crise économique, c’est, lorsque pour des raisons extérieures aux activités humaines, on manque cruellement de produits vitaux. 


Et pendant ce temps…le grand patronat français fait des affaires avec l’Allemagne !

Alors qu’Hitler se fait toujours plus menaçant...alors que le nombre de chômeurs et de bas revenus augmentent dramatiquement, que les sans-abris se font plus nombreux. 

En 1933, l’arrivée d’Hitler au pouvoir ne calme pas les ardeurs. Banquiers et financiers prétendant que les caisses sont vides quand il s’agit de répondre à la détresse populaire, n’hésitent pas à placer leurs capitaux en Allemagne où les investissements sont très rentables. Et pour cause, avec Hitler, pas de manifestations, pas de grèves, les salaires revus à la baisse, les profits en hausse, les grands patronats, allemand et français, se frottent les mains. Les affaires vont bon train ! 

Dans tous les domaines (chimie, sidérurgie, métallurgie, automobile, aéronautique, pétrole, charbonnages, textiles, minerai de fer, bauxite…), en toute conscience, les affairistes collaborent au réarmement de l'Allemagne hitlérienne. François de Wendel le président du Comité des Forges, sera à l’origine d’un cartel international de l’acier qui attribue 40% des parts à l’Allemagne.  

Opposant l’irresponsabilité des travailleurs français, à l’esprit civique du peuple allemand, réduit au silence par la terreur, De Wendel, dans son journal Le Messin, en juin 1936, écrira :

« Il existe près de nous, une Allemagne dont l'esprit civique mérite d'être signalé. Il en va de même pour l'Italie. »  

 

 

 

François de Wendel


                                                              Mussolini et Hitler

 

 Plutôt que de lutter contre le réarmement de l’Allemagne nazie, le grand patronat préfère lutter contre l’ennemi intérieur, contre « ces salopards en casquette » du Front populaire réclamant des congés payés, la semaine de quarante heures et des augmentations de salaires. Des patrons en appellent à des groupes fascistes briseurs de grève. 

« Plutôt Hitler que le Front Populaire »

Ce mot d’ordre, on l’entend dans les manifestations de droite et d’extrême droite, dans de quartiers chics, dans les palaces.

Devant l'antifascisme affiché de la population, les grands industriels français prennent des précautions. Ils multiplient les contacts avec les groupes industriels nazis, par l'intermédiaire de sociétés écrans suisses ou hollandaises. La Banque de France et le comité des Forges (le Medef de l'époque) sont les grands artisans de l'esprit de Munich, de la démission face à Hitler.  De Wendel ne cache pas son admiration pour Mussolini. Il ira jusqu’à financer le mouvement fasciste des Jeunesses patriotes.  

Véritable roi de France, le patron des patrons cumule la présidence du puissant Comité des forges, et la Régence de la Banque de France. Avec le Comité des Houillères, ce trio décisionnaire pèse de tout son poids sur l’entrée en guerre et la conduite du conflit. 

En 1938, la Compagnie Française des Pétroles se positionne pour une coopération étroite avec le Reich. La Banque de France sera partie prenante d’une société franco-allemande pour assurer l’envoi de matières premières stratégiques au Reich. En février 1939, à la Chambre des Députés, moins de 7 mois avant la déclaration de guerre, la Chambre de Commerce de Paris fondait un «Centre économique franco-allemand » !

Quand les dictateurs sauvent le grand patronat

Historiquement, les grands patrons sont les employeurs d’apprentis dictateurs.

Ernest, en 1922, l’année de ta naissance dans une famille ouvrière, Mussolini, prend le pouvoir. Plus grande fortune d’Italie, Agnelli finançait le parti fasciste depuis 1914. A Turin, le 22 août 1917, spontanément, les travailleurs et travailleuses croisent les bras contre la guerre déclenchée par le grand patronat européen. 

Une semaine plus tard, la violente répression de la police (50 morts parmi les grévistes, et plus de 1000 arrestations) met fin aux protestations. En 1920, un mouvement d’occupation des usines s’étend aux entreprises des principales villes d’Italie. Les Faisceaux italiens de combat de Mussolini, affrontent les travailleurs. La grève générale est brisée. D’autant plus facilement que les directions réformistes des syndicats et partis de gauche, voyant leur pouvoir sur les travailleurs, s’échapper, s’empressent de signer un accord avec le patronat

 

                  


             Usine Fiat, Agnelli et Mussolini



Quand Churchill félicitait Mussolini

Les fascistes figurent en octobre 1920 sur les listes électorales du « bloc constitutionnel » formé par les partis de gouvernement.

A la tête d’une armée de 50 000 militants armés, Mussolini marche sur Rome.

1922, Ernest, l’année de ta naissance, le fascisme s’installe en Italie. Pour le patronat, c’est le pactole. L’empire d’Agnelli s’étendra aux tracteurs, au chemin de fer, aux navires, et aux avions... Il rachètera la Juventus de Turin, créera sa propre banque. L’armement restera le secteur le plus lucratif. Et pour cause, les armes sont achetées par l’Etat avec les impôts qui écrasent les masses populaires.

En 1926, Churchill se rend à Rome pour féliciter Mussolini.  A la sortie de l’entrevue, il déclare:   

« Je n'ai pu m'empêcher d'être charmé … par la douceur et la simplicité du signor Mussolini […] il ne pensait qu'au bien du peuple italien […] Si j'avais été Italien, je suis sûr que j'aurais été de tout cœur avec vous […]  votre mouvement a rendu un service au monde entier. […] L'Italie a montré qu'il existe un moyen de combattre les forces subversives qui peuvent entraîner la masse du peuple»

Effectivement, par la dictature, Mussolini avait préservé les patrons de toute opposition ouvrière, leur permettant de faire des profits sans problème. Hitler, lui aussi, fut financé par le baron von Thyssen, la plus grande fortune d’Allemagne. À la dénazification, il reconnaît son implication dans la montée du nazisme et verse une indemnité aux victimes de la guerre. Il émigre en 1950 à Buenos Aires où il meurt, sans être nullement inquiété !

Les nazis aboliront les syndicats, comme les fascistes italiens l'avaient fait auparavant. La masse salariale baisse de 64% à 57% du revenu national. Et du fait de la hausse des impôts sur le revenu, la consommation baissera plus encore. Le traitement de choc infligé au peuple allemand fit que de 5 millions de chômeurs en 1932, l'Allemagne nazie n'en comptera plus que 400 000 en 1938. Hier comme aujourd’hui, l’important pour le patronat, ce n’est pas les conditions de vie des travailleurs, c’est qu’ils aient la force de retourner à l’usine le lendemain.

En Europe comme en Espagne avec Franco, en Amérique Latine, avec Pinochet… Mussolini et Churchill, son admirateur, feront des adeptes, chaque fois que l’économie de marché et sa monnaie d’apartheid seront menacées.

En 1945, à 22 ans tu découvres Jacques Duboin, fondateur du distributisme.  

Enthousiaste, tu t’inscriras dans cette dynamique jusqu’à ta centième année. 

Ancien secrétaire militaire de Clémenceau, ancien ministre (sous-secrétaire d’Etat au Trésor), ancien banquier, député, Duboin connaissait parfaitement les rouages du capitalisme. Analysant la tragédie de 1929, il explique que cette crise n’en est pas une. 

  

                                                         Jacques Duboin
 

Jetant aux orties ses habits de haut fonctionnaire, il critique sévèrement la théorie du « doux commerce » professé par Montesquieu, selon laquelle les échanges commerciaux entre pays favoriseraient la bonne entente politique et réduiraient le risque de guerre, est une farce. Nous l’avons vu plus haut, les années précédant les deux guerres mondiales, la France et l’Allemagne commerçaient intensément !

La technique permet de produire une quantité croissante de marchandises avec un nombre décroissant de travailleurs

Jacques Duboin: 

« Aujourd’hui… le droit aux produits et aux services doit êtrelibéré … du travail fourni, car celui-ci, conjugué avec l’outillage moderne, a maintenant un rendement hors de proportion avec l’effort humain encore nécessaireTous les hommes, enfin libérés de la plus grosse part de leur labeur, pourront jouir pleinement de l’existence, car ils ne sont pas mis au monde pour travailler, mais ils travaillent pour vivre.»

Le chômage, conséquence du progrès scientifique et technique est une bonne nouvelle. Le temps devenu inutile dans l’agriculture et l’industrie devrait être déversé dans le tertiaire : recherche, santé, enseignement, transport, sport, loisirs émancipateurs…

1929 révèle magistralement la contradiction fondamentale entre capacité de production et capacité de consommation ! Contradiction causée par une consommation se faisant au moyen d’une monnaie alignée sur le travail humain et non sur celui des machines et des écosystèmes.

Début 20ème siècle, grâce aux machines, la productivité s’envole. Dans les champs, même constat. En 1929, on était au seuil d’une nouvelle société, le travail humain devenant de moins en moins nécessaire, la morale aurait voulu que l’on légalise la distribution systématique des stocks d’invendus. Il aurait fallu reconnaître qu’un revenu aligné sur le travail représentait une aberration, pire un crime.  

Dans le monde entier, les gouvernants pour défendre profits et dividendes donnent l’ordre de détruire les montagnes d’invendus qui s’accumulent. 

L’inutilité croissante du travail humain dans l’industrie et l’agriculture aurait dû être accueillie avec joie par les grands décideurs se proclamant démagogiquement défenseurs des Droits de l’Homme. D’ailleurs, l’économiste Joan Robinson écrira, « Si la poursuite du profit, est le critère d’un comportement approprié, il n’est pas possible de distinguer l’activité de production et le vol ».  Et le gangster Al Capone de confirmer :

« Le capitalisme est le racket légitime organisé par la classe dominante ».


Dans son livre, « La grande relève des hommes par la machine », Duboin s’insurge :

« Les destructions volontaires de produits ont pour objet de provoquer artificiellement la rareté et augmenter ainsi la valeur indispensable aux échanges (…) n’est-ce pas une honte de la maintenir quand tout existe pour la supprimer ? » 

Obstinés, les patrons continueront de produire en fonction du seul temps de travail rentable alors que temps ne nous nourrit pas, ni ne nous loge, ni ne nous transporte…Les consommateurs estiment leurs achats en fonction des quantités exprimées en kg ou en litre. 

On a là un attelage contre nature, un cheval tirant dans un sens et l’autre dans le sens contraire. Profits et dividendes baissent dangereusement avec la fuite du surtravail. Les prix baissent, tant mieux pour les consommateurs, mais un désastre pour les grands décideurs qui s’effraient de voir leurs revenus baisser. 

Effectivement, le marché ne concerne que les humains. 

Les décideurs peuvent soumettre les salariés au chantage du chômage pour les forcer à sur-travailler davantage. Impossible de faire travailler une machine, au-delà de son entretien. 

Les productions purement machine étant gratuites, il faut produire en très grandes quantités pour compenser la baisse du profit par unité de marchandise. D’où le développement du consumérisme par la publicité et l’obsolescence programmée aux USA bien avant la deuxième guerre mondiale.

Producteurs et consommateurs déchirés par deux projets antagoniques, avec la hausse de la productivité qu’exige la concurrence, sont confrontés à toujours plus de conflits entre humains, mais aussi dans nos rapports dangereusement déséquilibrés avec les écosystèmes.  

Le désir de puissance des uns, s’accompagne d’un cortège de violences jamais égalées depuis l’arrivée des premiers hommes. 1929, non pas une crise, mais un crime.

Jacques Duboin dénonce l’imposture de ces « experts » qui condamnent l’humanité à la « rareté » :

 Les pauvres leur sont nécessaires (…) les hommes, au lieu de lutter contre la rareté des choses utiles (…) commencèrent à s’organiser pour lutter contre l’abondance, car celle-ci tue leurs profits (…) Créer des richesses dont les hommes ont besoin et les détruire ensuite, c’est toucher le fond de la bêtise humaine »

Tant que les privilégiés s’enrichissent tout va bien, jamais ils ne décrètent la crise alors que beaucoup de subalternes ont du mal à boucler leurs fins de mois

En 1935, Jacques Duboin crée l’association Le Mouvement français pour l’Abondance ainsi qu’une revue, La Grande Relève des hommes par la science. Le distributisme exercera une influence non négligeable sur les jeunes consciences de son temps.

Ernest, Georges Brassens que tu appréciais tant, recommandera sur Europe 1, la lecture du discours de Jean Rostand, tenu le 15 novembre 1968, à la Mutualité de Paris. Une intervention faisant l’éloge de Jacques Duboin.

 




Georges Brassens

 

Ernest, tu aimais rappeler ton militantisme dans une association qui comptait entre autres, des pionniers de l’écologie comme René Dumont ainsi que des scientifiques de renom comme Jean Rostand de l’Académie française, 

biologiste, historien des sciences,  Henri Laborit, médecin, chirurgien, neurobiologiste, spécialiste du comportement humain, des chercheurs bousculant courageusement dogmes et croyances fausses.  

 

 

 


Henri Laborit

Abattant les frontières entre les disciplines, dans une pensée globale, les travaux de Laborit ont ouvert la voie aux neurosciences. Magistralement, il a mis en évidence le monde de la matière et le monde de l’immatériel. 

Le monde de la production d’objets physiques obtenus par transformation de matières premières et d’énergies, c’est-àdire, le monde de l’économie. Et celui de la non économie, de la non dépense, le monde la création ex nihilo de l’information sans transformation aucune du stock initial.

 Le fonctionnement normal du cerveau humain dans un organisme en bonne santé, permet de comprendre l’aberration des fondements de  l’économie de marché :  « La structure des sociétés humaines est essentiellement la résultante, à un niveau d’organisation plus élevé, de la structure biologique des éléments individuels qui les constituent ».

Philosophe, alliant réflexion et tâtonnement expérimental, ce chercheur démontrera l’imposture de la supériorité du travail intellectuel sur le travail manuel. 

« Le cerveau informe, la main transforme » 

Laborit établit un parallèle entre le corps humain et le corps social, grand corps biologique par excellence. 

L’inventeur conçoit une machine, des ouvriers la construisent en suivant ses instructions. 

Deux statuts différents fonctionnellement parlant, mais interdépendants et donc absolument complémentaires. En aucun cas l’inventeur ne devrait exiger un droit de péage à la fabrication et l’utilisation d’une invention qui repose sur l’héritage commun de millions d’années de savoir et savoir-faire non brevetés. 

Le chercheur n’est ni supérieur, ni inférieur, tout simplement coopérateur ! 

La paléoanthropologie nous l’apprend sans la libre circulation des savoirs et savoir-faire, jamais n’aurait émergé le cerveau sapiens. James Watt, dans l’invention de la machine à vapeur, en truffant la moindre de ses trouvailles de brevets a interdit à de jeunes ingénieurs de l’étudier en vue de l’améliorer. C’est ainsi que la conception de la première locomotive, fut retardée de plusieurs dizaines d’années. 

L’information, sans dépense de matières, relevant de la gratuité, est utilisable par un nombre illimité de gens dans le temps et dans l’espace, sans aucun risque de pénurie. Assumant des fonctions indispensables, mais de natures différentes, le cerveau et la main fonctionnent dans une complémentarité excluant tout échangeabilité. 

Ernest, toi qui n’as cessé de battre en brèche les idées reçues, tu étais comblé lorsque Laborit démontrait scientifiquement que les phénomènes de domination prennent leur source dans l’activité du cerveau reptilien. Le plus primitif de nos trois cerveaux, car étant le siège des comportements instinctifs. Jusqu’à leur mort, bien audelà de la satisfaction maximum de leurs besoins fondamentaux, les ultrariches, dans la concurrence qui les oppose entre eux, recherchent à se hisser toujours plus haut. Leurs possessions mobilières et financières représentent le code génétique de la comparaison ostentatoire qui définit leur place dans la pyramide sociale. A un journaliste qui lui demandait pourquoi il ne donnait pas une partie de sa fortune à des organisations humanitaires, le milliardaire Ted Turner répondit que cela lui était impossible, par peur de reculer dans le classement mondial. 

Les banquiers ont l’art de transformer le gratuit en payant

Les revenus secteur bancaire comme tous ceux des  services (mondialement 65% des individus, en France, 90%), du manutentionnaire au milliardaire, proviennent des travailleurs de l’industrie et de l’agriculture, les seuls à produire des valeurs marchandes. Adam Smith, maître à penser de tous les grands décideurs depuis plus de 200 ans le démontre fort logiquement. Sauf que les gouvernants et économistes orthodoxes, admirateurs de l’auteur de La richesse des nations, se gardent bien d'en parler, le sujet est tabou !

Les travaux de Laborit sur l’information nous aident à comprendre les dangers d’une monnaie faussement considérée comme une marchandise : 

 « L'information n'est qu'information. Elle n'est ni masse ni énergie, bien que n'existant pas sans elles. » 

 La monnaie indique un prix comme la balance, une masse. La monnaie est créée ex nihilo. La création monétaire ne relève pas d’une industrie mais du secteur tertiaire, celui des services. Pourquoi prendre des intérêts sur un service relevant de la gratuité, de la non économie ?  

Par le crédit, le banquier ne transmet qu’une information, des chiffres et des lettres sur papier ou fichier informatisé. Une campagne de constat d’huissier prouverait que les intérêts sur la création monétaire sont illégitimes.

On ne donne pas une information, on la transmet tout en en conservant l’usage.

Par contre, on ne transmet pas une orange, on la donne ou on la mange. L’échange d’un service, contre une valeur marchande relève du vol en bande organisée.

Au-delà d’enrichir les banquiers, la dette agit comme un fouet entretenant le surtravail, pareille aux effets de l’obsolescence et la publicité…

La Terre n’a pas de compte en banque, pourquoi acheter ce qui n’est pas vendu ? 

La création monétaire doit se faire en fonction des richesses que la Terre, gratuitement, offre à tous. D’autant que tout financement est une atteinte à la santé planétaire (santé publique et santé des écosystèmes).

Pour preuve, à quelques années de distance, la concurrence allant de pair avec la productivité, on constate que pour une même valeur marchande, pour un même prix, l’empreinte carbone augmente sans cesse. Ecologiquement parlant, les scientifiques constatent que l’on vit à crédit sur la biocapacité de l’année suivante.

La pollution n’a pas de frontières, écoutons la Terre, pas les actionnaires

La pollution augmente avec les revenus. Plus on consomme, plus on pollue. Les 10 % les plus fortunés de la planète sont responsables de 50% des émissions carbone. Les 63 milliardaires français possèdent au total un patrimoine financier équivalent à l’émission 152 millions de tonnes de tonnes CO2 en une année. Le seul Bernard Arnault, rien que pour son yacht, 16 000 tonnes de CO2 par an…comparativement,  l’empreinte carbone moyenne d’un Français est de 5 tonnes de CO2 par an (source : Agence internationale de l’Energie 2017).

L’empreinte carbone génère : déforestation, pollution, crise climatique, montée des eaux, sécheresse, incendies, virus, pandémie…

Dioxyde de carbone (maladies cardiovasculaires, diabète, obésité, cancers…) est la première cause de mortalité. L’inégalité des revenus pollue et tue : 100 000 victimes en France, 9 millions dans le monde chaque année. Les conflits armés, quelques centaines de milliers…

Pas de santé planétaire sans l’égalité des revenus. Un revenu calculé par les chercheurs en science de la Vie et de la Terre, dont le montant s’élèverait à 1,7 hectares de surface bio productive planétaire. Pour une neutralité carbone de 2 tonnes. Revenu alimenté par une monnaie non circulante détruite dès l’accès au produit, interdisant toute conduite contraire à l’intérêt général.

Quand « la liberté des uns s'arrête là où commence celle des autres », les produits toxiques circulant librement à la surface de la planète, le Vivre ensemble nous commande de réguler mondialement nos rapports de voisinage.

Pour en arriver à ce niveau de conscientisation, encore faut-il réaliser à quel point l’opinion publique est manipulée afin que nous consentions aux projets des dominants.

Encore faut-il se référer à la genèse des cabinets d’experts et leur rôle prépondérant dans les communications commerciales et politiques d’aujourd’hui.

Il a une centaine d’années, récupérant les travaux de son oncle Sigmund Freud, Edward Bernays prétendra qu’électeurs et consommateurs "n’ont pas besoin de ce qu’ils désirent et ne désirent pas ce dont ils ont besoin". 

Rappelant que les élites « gouvernent en vertu de leur autorité naturelle, de leur capacité à formuler les idées dont nous avons besoin », on se doit de « dompter cette grande bête hagarde qui s’appelle le peuple … à laquelle il faut fournir une illusion… ». 

Exploitant l’inconscient, il ciblera les émotions siégeant dans le cerveau reptilien archaïque des foules. 

Premier grand théoricien des relations publiques, il développera « la fabrique du consentement » au marché et aux gouvernements, conseillant « d’enrégimenter l'opinion publique…comme si [on voulait] lui vendre des tubes de dentifrice ».  

Il aida également la CIA dans une opération réussie de renversement d’un gouvernement qui s’opposait à l’exploitation du pays par des multinationales. 

   




Dès l’antiquité, un pharaon, face à la révolte des « gilets jaunes » de l’époque, conseillait son fils pour conserver le pouvoir : 

« Sois un artiste de la parole, pour devenir fort, car la langue, c'est une épée pour un roi, la parole est bien plus puissante qu'aucun combat. Rien ne surprend celui qui est intelligent ».  

A cette manipulation qui joue un rôle si important dans nos sociétés dites « démocratiques », Laborit réplique :

« Toute occultation de l’information au profit des leaders, [aboutit à] une pseudodémocratie ou à un système bureaucratique […] Le système nerveux n’est pas la « classe dominante » de l’organisme, pas plus que le cerveau n’en est le « patron ».

Ernest, la lutte victorieuse contre l’implantation d’une centrale nucléaire dans la région du Pellerin, te donnera la possibilité de faire connaître la réponse des distributistes.

 

 

 


 Après plus de 20 ans, le projet fut abandonné. Curieux de tout, tu adorais notamment porter la contradiction aux directeurs de banque. 

En 2007, à 85 ans, Ernest, tu rejoindras le groupe Libérons La Monnaie. Grand joueur d’accordéon et amateur de bonne chair, tu y militeras joyeusement.

Avant l’inauguration de l’exposition sur le travail d’une année autour du la nature et du rôle de la monnaie dans la société, tu es venu à l’école.

Je me souviens de ta surprise, lorsque dans ma classe de CM1, tu as rencontré des enfants capables de démontrer la gratuité de la monnaie. Un directeur de banque invité quelques temps auparavant, lui aussi avait été étonné. Courageusement, il reconnut que l’université l’avait trompé sur la nature et le rôle de la monnaie. 

Ernest, pour la première fois de ta vie, enfin, tu rencontrais un banquier reconnaissant la vérité. 

La création monétaire fragmente le corps social, en opposant en son sein, les professions dites supérieures qui n’existent qu’en fonction de celles que l’on désigne comme étant inférieures. 

A ce sujet tu m’as raconté au cours d’un entretien vidéo, un évènement survenu à l’âge de 7ans et qui t’a marqué à vie. Ta mère te sortant si violemment de l’église, que ton épaule en a été luxée. Tu avais recraché l’hostie collée au fond de ta gorge.

Envahie par la honte, ta mère n’avait pas supporté le regard réprobateur des « gens de biens » sur les « gens de rien ».

Quelques extraits de deux  de tes articles publiés sur le site Libérons La Monnaie.

En 2015, à Macron, ministre de l’économie et des finances :

« A l'ère de la révolution techno-numérique, le chômage croît en même temps que les productivités, tandis que la production augmente […] Le chômage de masse n'est pas une fatalité,.[…] d'où la nécessité de sortir des sentiers battus, […]  ces esclaves mécaniques [machines et robots] ne consomment pas la production pour laquelle ils ont été programmés […]   la dissociation du couple emploi-salaire ressort d'une évidence mathématique et sociale […] 

A l'ère des robots, l'humain doit vivre d'une production socialement et utilement programmée sur le travail d'esclaves mécaniques et/ou informatisés, et non en devenir l'esclave. […] La transformation du chômage par le partage des tâches non réalisées par les robots, libérant ainsi de formidables quantités de temps dans les secteurs où il y en a tant besoin : santé, vieillesse, agriculture bio, etc….

Ainsi, ces mesures permettront de travailler moins et de travailler tous, […] avec pour conséquence, d'arrêter le scandale de surcharge de travail pour les uns, au point de se suicider, pendant que d'autres dépriment de ne pas pouvoir s'investir pour l'intérêt général ! 

Nous aurons le temps de nous occuper des enfants, des anciens…et d'accéder à des loisirs culturellement enrichissants.[…] Ce socialisme authentique étendu à nos pays dits développés, conduirait à l'arrêt du scandaleux gaspillage productiviste (par exemple, l'obsolescence programmée des biens) ravageant la terre et les pays pauvres, et permettrait d'aider leurs habitants à travailler et à vivre chez eux, pour qu'ils n'aient plus à émigrer et à subir la violence extrême actuelle qui se développe sur le terreau de la misère. »

Cité dans ton dernier article, Einstein affirmait:

 "Le capitalisme...est...la source réelle du mal ."

 



Dans ta centième année, le 10 novembre 2022, la mort te surprendra en pleine possession de tes facultés intellectuelles.

Peu de temps auparavant, tu publiais: « Chance et relance »:

 « Il appartient de créer … une monnaie de consommation, monnaie étant détruite dès le que le bien est consommé, tel un ticket de métro…Einstein aimait à dire qu’on ne peut solutionner un problème, en conservant les éléments l'ayant engendré...L’humanité s'acheminerait alors vers une un monde respectueux de l’environnement et de ses enfants...Dans cet esprit, nous proposons l’égalité des revenus dans le respect de l’environnement ».  

On n’oubliera jamais ton énergie débordante et ton enthousiasme que le temps avait conservé intacts. Ils se manifestaient, entre autres, à la fin de tes interventions, par un :

« Que dire de plus ?»

 

 

 

 

Ci-dessous, liens des articles d’Ernest Barreau et de Remi Drouet, publiés sur le site Libérons La Monnaie :

 

avril 21      Chance et relance Ernest Barreau, résis...

 

avril 20      La retraite à l'ère des robots

 

janvier 1   Justice sociale ou Titanic économique

 

février 18    Le coût des milliards     

 

avril 17     Revenu social ou chaos permanent ?  

 

 mars 16  Sauver la planète !

 

septembre 15   Un ancien résistant au ministre de l'économie  

 

avril 13    Robots :la machine à vendanger n'achète pas de vin !



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