Du travail ou de l’argent ?
par Jacques Duboin
Des milliers de chômeurs secourus demandent du Travail !
Des milliers de chômeurs non secourus demandent du Travail !
Des milliers de chômeurs partiels réclament du Travail !
Des milliers et des milliers de travailleurs
qui, à 45 ans, ont perdu leur emploi, réclament du Travail, mais les
patrons les trouvent déjà trop âgés...
Pour les jeunes sortant des écoles professionnelles et non embauchés,
on réclame du Travail...
on réclame du Travail...
Pour les réadaptés, les mutilés, etc...
on réclame du Travail...
on réclame du Travail...
Pour les clochards, l’abbé Pierre réclame du Travail,
car parmi ceux
qu’il ramasse la nuit sur le trottoir,
se trouvent des gens instruits
qui supplient qu’on leur trouve du Travail.
Pourquoi espérer trouver du Travail
quand les magasins et les marchés
regorgent de marchandises ?
Quand on solde et resolde des articles de tous genres ?
Quand, dans
le centre de Paris on en offre bientôt sous toutes les portes cochères ? Quand, à la campagne, les greniers sont pleins, archi-pleins, les caves
archi-pleines.
Il existe tant de marchandises
qu’on ne passe pas de
commandes à certaines usines
obligées de tourner au ralenti
ou de fermer
en licenciant leur personnel.
Pourquoi veut-on que les producteurs donnent du Travail ?
Pour vivre ?
Mais réclamons alors de l’argent pour acheter les produits dont on a besoin et qui existent. L’économie d’un pays n’a jamais eu pour objet de fournir du Travail aux hommes, mais de leur procurer des produits pour vivre.
Est-ce de notre faute si les produits abondent et que le Travail
devient rare ?
Inutile donc d’aller mendier de porte en porte du Travail
qu’on nous refuse :
ce qu’il faut exiger, c’est un revenu social sans
lequel le droit à la vie devient une plaisanterie de très mauvais goût.
Le revenu social, c’est l’argent nécessaire pour exercer le droit à la
vie;c’est l’argent nécessaire pour acheter notre part dans une
production qui réclame toujours moins de labeur.
Est-ce notre faute si cette production n’a eu besoin ni de nos bras
ni de notre intelligence ?
Nous sommes tous les héritiers d’un
gigantesque patrimoine accumulé grâce aux efforts de ceux qui nous ont
précédés sur la terre. En conséquence, nous disposons d’un outillage
puissant qui a produit toutes ces richesses qu’on ne parvient plus à
vendre,et qui en produirait bien davantage puisque les machines sont
infatigables.
Le revenu social n’est donc que notre part individuelle dans l’usufruit de cet immense héritage collectif.
Quant aux salariés, pourquoi ne réclament-ils pas leur « revenu
social » au lieu de la traditionnelle augmentation de salaire qui n’est
plus qu’une illusion ? C’est qu’ils sont peut-être fiers de toucher
aujourd’hui un salaire, mais sont-ils bien sûrs de le toucher demain ?
N’oubliez donc jamais que les travailleurs ne sont que les rouages
d’une machine qui sera inventée demain. Ainsi le veut le progrès dans
notre vieux système économique des prix-salaires-profits.
En effet, le patron ne peut embaucher que le personnel dont son
outillage a besoin, donc pas un ouvrier de plus. Et la concurrence
française ou étrangère l’oblige de perfectionner constamment son
outillage, donc de n’embaucher que toujours moins de travailleurs.
Est-ce que le procédé de fabrication le plus moderne n’est pas celui
qui exige le moins de main d’oeuvre ? Il faut donc en finir avec ce
douloureux paradoxe de l’homme capable d’inventer une machine qui
travaille à sa place, mais incapable de travailler pour lui.
Hâtons-nous donc de réclamer pour tous le revenu social...
On vous répond : où prendre l’argent ? Mais est-ce difficile d’en
trouver pour faire la guerre, par exemple, celle d’lndochine ? En
réclamant et en obtenant le revenu social pour tous les Français, sans
distinction d’âge et de sexe, on rendra un immense service à l’État, car
il sera obligé de transformer notre stupide système financier.
Or cette transformation est nécessaire pour l’État lui-même puisque,
comme la majorité des consommateurs, il est toujours à court d’argent.
Voilà qu’il ne peut plus construire de logements...ll manque d’argent
pour construire des écoles, des hôpitaux...
En obtenant le revenu social qui permettra aux Français d’acheter
toutes les marchandises produites par les Français, on sauvera les
hommes politiques d’un ridicule qui les accable quand ils ignorent
comment se procurer ces fameux «crédits», comme s’ils tombaient de la
lune. Pourquoi manquent-ils quand on en a besoin ?
Avec le revenu social, on fait la conquête du bien-être matériel et
de la quiétude du lendemain. On réalise la véritable révolution sociale
que les progrès du XXe siècle rendent obligatoire.
Inutile d’édifier ces vieilles barricades meurtrières qui ont fait
partie des révolutions des âges révolus. Il suffit de comprendre que le
revenu social est nécessaire, indispensable et urgent.
Et quand vous l’aurez compris, pourquoi ne le feriez-vous pas comprendre aux autres?
Un site remarquable, animé, entre autres, par Marie-Louise Duboin,
la fille de Jacques Duboin
la fille de Jacques Duboin
Association pour l'Economie Distributive