Bourdieu, l’Etat, une
maffia
Dans « Sur
l’Etat : Cours au Collège de France (1989-1992) », Pierre Bourdieu compare
l’Etat à une organisation de type mafieux :
« Un racket comparable à celui
des gangsters de Chicago en ce sens qu’il assure une protection contre la
violence en échange d’une rétribution (l’impôt). Avec une différence de taille
[…] personne, ou presque, n’en conteste la légitimité […] La bureaucratie ne
fait pas seulement des archives, elle invente aussi du discours de
légitimation […] La construction de l’Etat est en grande partie une
invention mentale ».
Cet ouvrage révèle les
illusions entretenues sur l’Etat défenseur du bien commun, au nom de l’intérêt
général. Pendant trois années, il travaillera entre autres, sur cette notion
d’un « intérêt collectif bien compris », qu’on inculque aux enfants
dès l’école primaire, en cours d’éducation civique et en histoire.
« Ce que j’essaie de transmettre, c’est
une manière de construire la réalité qui permet de voir les faits que,
normalement, on ne voit pas ».
Une réalité cachée par
la quasi-totalité des historiens et archéologues qui s’évertuent encore, à
magnifier les sociétés étatisées de l’Antiquité, ne laissant à la
contemplation, que la splendeur empreinte d’une débauche de luxe et de
somptuaire, sans pareil, en omettant d’éclairer la condition misérable des
populations, réduites en domestication par un Etat prônant la conservation et
la protection des privilèges de ceux qui le dirigent.
Dans la revue «Sciences
sociales et démocratie», Pierre Bourdieu évoque la forêt de la grande
délinquance que masque l’arbre de la petite délinquance massivement
médiatisée.
« Je dirai seulement, pour
donner à réfléchir, qu’il y a une loi de conservation de la violence et que si
l’on veut faire diminuer véritablement la violence la plus visible, crimes,
vols, viols, voire attentats, il faut travailler à réduire globalement la
violence qui reste invisible (en tout cas à partir des lieux centraux, ou
dominants), celle qui s’exerce au jour le jour, pêle-mêle, dans les familles,
les usines, les ateliers, les commissariats, les prisons, ou même les hôpitaux
ou les écoles, et qui est le produit de la « violence inerte » des structures
économiques et sociales et des mécanismes impitoyables qui contribuent à les
reproduire ».
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