mardi 28 février 2023


MALADIES ORPHELINES

OU

 LA VALEUR TRAVAIL 

CONTRE L’INTERET GENERAL

 

Par Alain Vidal

 


 Ce qui vaut pour les maladies rares l’est tout autant pour la satisfaction des besoins fondamentaux des populations.

A Nantes dans ma classe de CM1, une petite fille était atteinte d’une maladie, orpheline, le syndrome de Crigler-Najjar, maladie génétique du foie, qui se caractérise par l'accumulation anormale de bilirubine dans l'organisme. D’où un teint jaunâtre permanent évoquant une jaunisse.

Souvent absente, elle devait rester allongée dans un lit, nue sous des lampes à lumière bleue spéciale. Elle ne pouvait jamais rester dormir chez des amis, encore moins partir en vacances

Pour son enfant atteint de la même maladie, un ingénieur américain avait conçu un lit pliable et transportable. Aucune entreprise n’était preneuse pour le commercialiser, la rentabilité étant nulle avec dans le monde quelques centaines seulement de cas dont 20 en France…

Pour pallier à ce manque, j’ai organisé une collecte. Les enfants, les parents de l’école y ont participé, ainsi que les commerçants du quartier. Grâce à la somme réunie, cette enfant a retrouvé une certaine autonomie, tout à la joie de pouvoir aller à des anniversaires et d’effectuer des séjours prolongés au bord de la mer, grâce à ce lit qui l’accompagnait partout.

Avec une monnaie non circulante alignée sur ces véritables richesses que sont les matières premières offertes gratuitement par notre planète, pour la fabrication de notre environnement physique, les maladies orphelines…de chercheurs et de traitements, ne le seraient plus.

Plutôt qu’une monnaie non circulante alignée sur les espaces bio-productifs, sources de toute vie, l’économie de marché nous impose une monnaie bancaire.

Une monnaie (alignée sur le temps de travail) représente une mesure des richesses limitant dangereusement la satisfaction des besoins fondamentaux de l’humanité. Une mesure qui permet d’échanger une partie des productions destinées à la consommation populaire, contre des productions réservées aux revenus supérieurs.

Comme il est impossible d’échanger en unité de masse, des   pommes de terre contre des diamants, le temps, est le seul équivalent universel de l’économie de marché. Et ce, depuis l’édification du premier Etat, fondé sur l’économie de marché exigeant l’inégalité des revenus, il y a 5000 ans, en Mésopotamie.

Avec le remplacement des hommes par les machines, les prix baissent par unité de marchandises, de par la réduction du   travail humain. Le progrès technologique entre les mains d’une minorité de propriétaires de moyens de production, sert avant tout à gagner des marchés. Cependant, pour compenser la perte de profit par unité, on augmente le volume de la production. Si bien que pour une même valeur marchande, pour un même profit, à quelques années de distance, on gaspille davantage de matières premières et d’énergies fossiles.   

  La priorité du marché étant le profit, si une production n’est pas suffisamment rentable, des besoins fondamentaux ne seront pas satisfaits alors même que l’écosystème pourrait y répondre.  

 Le moins cher pour le consommateur « coûte très cher » à la planète, avec pour conséquences : déforestation, engrais chimiques, pollution, crise climatique, montée des eaux, maladies, épidémies et accroissement exponentiel des maladies émergentes.

La lutte au sommet pour la plus grande fortune épuise les hommes et les sols.

En France, plus 3 millions de maladies rares, mais très peu de cas par maladies. Par contre, le marché du cancer est très florissant. Rien que le cancer des poumons, 46363 nouveaux cas diagnostiqués en 2018.

 Institut Curie :

 « La lutte contre le cancer du poumon est un enjeu majeur de santé publique et une priorité ».

Pauline du Rusquec, onco-pneumologue :

 « Prévention, dépistage organisé, innovation… nous devons nous mobiliser sur tous les fronts contre le cancer du poumon, particulièrement meurtrier. Ces dernières années, grâce aux thérapies ciblées, à l’immunothérapie, mais aussi à l’arrivée de nouvelles classes thérapeutiques… la recherche a fait des progrès majeurs. Les résultats prometteurs s’apprêtent à transformer la prise en charge et à changer véritablement la donne pour les patients atteints de cancer du poumon. »

Cependant, en 2016, la campagne de l’ONG Médecins du Monde, contre la cherté des médicaments sera interdite d’affichage public par l’autorité professionnelle de régulation de la publicité (ARPP), jugeant cette action nuisible aux laboratoires pharmaceutiques. On le comprend à la lecture des affiches prévues pour la campagne :

 « Bien placé, un cancer peut rapporter jusqu'à 120 000 € »

« Le cholestérol, un placement à forte rentabilité et garanti sans risque »

« Avec l’immobilier et le pétrole, quel est l’un des marchés les plus rentables ? la maladie »

« Le cancer du sein, plus il est avancé, plus il est lucratif »

« Chaque année en France, le cancer rapporte 2,4 milliards d’euros »

« Seul 1% des français peut se permettre d’avoir une hépatite C »

« 1 milliard d’euros de bénéfice, l’hépatite C, on en vit très bien »

On comprend mieux que ces pathologies fassent l’objet d’une « recherche clinique dynamique et encourageante » pour les patients, certes, mais avant tout et surtout pour les super profits qu’engrangent les multinationales de la santé.

A l’inverse, on ne peut que constater le peu de recherches concernant les maladies rares marquées du sceau infâme de la non rentabilité... 

N’étant pas un facteur de croissance du PIB, la lutte contre les maladies rares n’est pas un enjeu national et encore moins une priorité car elle  n’entraîne pas un accroissement de richesses marchandes, richesses permettant à une infime minorité de la population française, très exactement, 65 milliardaires de s’offrir yachts et jets privés, des suites somptuaires à l’année dans les plus grands palaces, pendant que ceux atteints de maladies rares et leurs aidants, souffrent au quotidien de l’indifférence des ultra riches. Une indifférence qui confine au mépris.

L’enrichissement, la possession de biens matériels onéreux, le recours sur une très grande échelle, aux services à la personne (chauffeur, secrétaire particulier, cuisinier…), font partie du code génétique de ceux qui recherchent la respectabilité et les honneurs.

Dans tous les Etats, le pourcentage d’ultra-riches décorés pour service rendus au pays, est considérable, légion d’honneur et autres signes du devoir accompli !  Et pour cause, cette richesse marchande produite par les premiers de corvées, alimente généreusement par l’impôt, les revenus des grands décideurs politiques du sommet de la pyramide étatique : ministres, présidents, sans oublier les hauts fonctionnaires et leur droit au pantouflage. Des revenus qui peuvent atteindre, en comptant les privilèges qui s’y rattachent, des dizaines de milliers d’euros mensuels.  Pour eux, pas d’attente de plusieurs heures aux urgences… Leur situation leur permettant d’être admis à l’hôpital américain de Neuilly ou encore, à celui du Val de grâce réservé aux personnalités.

Pour ces gens-là, des pensions de retraites dorées supérieures à 10 000 euros mensuels…Pour eux, pas de syndrome musculo-squelettiques et autres syndromes spécifiques, caractérisant les métiers aux activités répétitives effectuées par ceux qui touchent des pensions misérables.

S’insurger contre le prix des médicaments, comme l’a fait Médecins du Monde, c’est très bien, à la condition d’aller voir ce qui se cache derrière le prix. On y découvrira une fausse marchandise : la connaissance. L’économie de la connaissance, ça n’existe pas !

En effet, la cherté d’un traitement, correspond essentiellement aux coûts liés aux activités tertiaires : recherche, publicité, communication, lobbying. Autant d’activités n’exigeant aucune dépense en termes de ressources planétaires. Aucune dépense, puisque relevant d’activités spécifiques à l’atelier cérébral, domaine privilégié des productions immatérielles non mesurables, à l’inverse des biens physiques !

Les services dits marchands transforment le gratuit en payant. Quand on vend un bien matériel, on ne l'a plus. Quand « on vend » un bien immatériel, « le vendeur » le conserve. En réalité, le bien immatériel a été transmis sans que le transmetteur ne le perde. Bien que complémentaires et indispensables l’une à l’autre, mais sans aucune caractéristique commune, les créations cérébrales et les productions manuelles ne peuvent s’échanger.

L’instauration de la monnaie non circulante inaugurerait le passage d’une société en mode Microsoft à une société en mode Linux.

Savoirs et savoir-faire, informations, inventions, procédés technologiques…sortant de l’atelier cérébral, circulant librement alimenteraient une intelligence collective, condition première du rééquilibrage des relations humaines. Les Terriens seraient reconnus dès leur naissance et jusqu’à leur mort, dans une égale dignité. Ni supérieurs, ni inférieurs.

L’éboueur ne pouvant se passer de l’ingénieur et vice versa, nous serions tous coopérateurs. Nous retrouverions une motivation au travail bien fait, au travail d’intérêt général au nom du bien commun.

La crise socio-écologique est due à une monnaie circulante par nature antisociale et anti écologique, une monnaie légalisant l’appauvrissement pour l’enrichissement bien au-delà des besoins fondamentaux. Au grand bénéfice d’une élite addicte au luxe, cette   esthétique de la domination, cette esthétique anti éthique…

Nos technologies font que machines et robots remplacent des centaines, des milliers de travailleurs, de l’ouvrier à l’ingénieur. La valeur travail tant vantée comme unique source des richesses est une imposture. Pour les produits de consommation courante, le travail humain n’existe qu’à dose infinitésimale.

La monnaie non circulante s’annulant à l’obtention du produit désiré, respecterait les hommes et les sols. Le temps économisé par le remplacement des travailleurs par les machines et robots, ne renverrait personne à la case chômage.

Ce temps si précieux serait massivement déversé dans les services : santé, instruction, alimentation, transport…

La recherche ferait un bon extraordinaire, les chercheurs, ne perdaient plus 80% de leur temps à monter des dossiers de financement.

Chacun disposerait, de la naissance à la mort, d’un revenu de 1,6 hectares de surfaces bio productives destinées à nos besoins physiques. Un revenu prélevé sur un budget-Terre de 12 milliards d’hectares bioproductifs. Surface d’où proviennent tous nos biens matériels de nos sphères personnelles et professionnelles. Quant aux services, les activités du tertiaire relevant de l’immatériel sans destruction-transformation de matières premières, ils seront accessible sans carte verte.

Dans les magasins, pour chaque acquisition de biens matériels, le montant serait automatiquement annulé sur une carte verte alimentée chaque année en monnaie-Terre.

Les 10% les plus fortunés de la planète sont responsables de 50% des émissions carbone. Par contre, pour les 50% les plus pauvres, la responsabilité n’est que de 10%.  Comme, les scientifiques le constatent, la surconsommation sans limite de 800 millions n’est possible que dans la sous consommation chronique de la moitié appauvrie, c’est-à-dire, 4 milliards d’’êtres humains !

 Pas question que certains aient le droit de polluer aux dépens d’autrui, ce qui exige l’égalité des revenus. Revenu ne dépassant pas 2 tonnes de CO2 par an et par personne.  C’est la seule et unique condition au retour à la neutralité carbone.

Pour l’humanité, en termes de décès prématurés, les émissions de gaz à effet de serre représentent le premier facteur. Chaque année, depuis fort longtemps, le bilan ne cesse de s’alourdir, l’an dernier, 9 millions de victimes dans le monde, principalement de maladies cardio-vasculaires…en France, 100 000, en Europe, environ 1 million.

Morale :

la pollution augmentant avec le revenu, plus on consomme, plus on pollue, plus on tue. A savoir que, l’empreinte carbone moyenne d’un Français est de 5 tonnes de CO2 par an (source : Agence internationale de l’Energie 2017).

La monnaie-Terre non circulante de mains en mains, annoncerait l’avènement de la démocratie, la vraie, dans le respect des hommes et des écosystèmes, dans le respect des besoins fondamentaux, avec pour seul fil à plomb, la prise en compte des limites de la biocapacité des écosystèmes et la prospérité pour chacun.

Dégradés par l’économie de marché, les espaces aquatiques et terrestres seraient régénérés. La crise socio-écologique dépassée et la santé planétaire revenant, redonneraient aux jeunes générations le sens du travail libéré du surtravail, et l’amour de la vie.

 

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