mercredi 6 juin 2012

Le marché de la connaissance n'existe pas


 


Le marché de la connaissance n'existe pas
par Alain Vidal 




On échangera une baguette contre une plaque de chocolat, mais une idée, ça se transmet, ça ne s'échange pas...


Le savoir (savoir-faire, procédés, recettes, formules…) ne sont pas des objets physiques tels que les biens matériels.
Les biens matériels ont des caractéristiques physiques mesurables (masse, forme…). On peut se les approprier, on peut les échanger, par l’usage on les consomme, on les détruit. Par contre, le savoir est inappropriable, inéchangeable et inconsommable.
Comment être dépossédé d’un savoir qui, simultanément, peut être utilisé par un nombre illimité de personne ?
Comment s’approprier un savoir dont on ne peut être dépossédé ?
Comment échanger un savoir qui ne connaît que la transmission sans déperdition aucune ?
Comment consommer un savoir qui s’enrichit par l’usage du plus grand nombre ?
Comment pourrait-il exister un marché du savoir, « un marché de la connaissance »,  alors qu’un bien immatériel ne présente aucune des caractéristiques qui légitiment  l’échange des biens matériels rares ?
Contrairement aux biens matériels, le savoir est indivisible.
Les biens matériels rares sont des « biens rivaux » : si c’est à moi ce n’est pas à toi !
Etant indivisible et inappropriéable, le savoir est par nature inéchangeable.
Quand on transmet un savoir, on ne perd rien, au contraire, la circulation du savoir ne fait qu’augmenter sa valeur, de par les contributions des utilisateurs.
L’utilisation du savoir n’est pas destructrice, bien au contraire, elle est créatrice, en ce sens, la circulation du savoir relève intrinsèquement du processus de production de connaissances.
En aucune manière, le savoir ne peut avoir un prix car il échappe subtilement à tout échangisme, à toute logique de marché.
La mémoire, « boîte à outil de production de savoir », ne relève pas de la sphère de l’économie car l’économie est la gestion de la rareté qui appelle un système fondé sur l’échangisme.
Libéré du verrouillage par les brevets et les droits d’auteurs, le savoir circulant librement apporte dans son sillage la gratuité dans l’abondance des inventions génératrices de réduction du temps consacré à la production des biens matériels. Et notamment ce bien matériel qu’était la monnaie autrefois de par l’exigence d’un support qui nécessitait, comme l’or, de grandes quantités de travail.
Aujourd’hui, l’information monétaire libérée de son support physique en est réduite à l’état de savoir immatériel ignorant rareté et pénurie.
Le véritable moteur de l’histoire, c’est ce pouvoir quasi infini de production de richesses dans la libre circulation porteuse de mutualisation. 
L’invention dans la coopération est une source de joie communicative, à l’opposé de la tristesse, voire du stress, que provoque le travail dans la subordination, dans l’aliénation à la corvée pour le seigneur du capital (salariat et profit bancaire).
En ce sens, la propriété intellectuelle apparaît comme facteur premier de production de rareté. Une rareté artificiellement créée par certains pour donner l’illusion de la nécessité de l’échangisme sans lequel une minorité ne pourrait se procurer les produits de luxe à très haut contenu en travail humain. 
Un système d’enclosure du bien commun privatise l’héritage de l’humanité de savoirs et savoir-faire cristallisés dans les machines mises sous tutelle par le droit inique de la propriété intellectuelle.
La propriété intellectuelle ne protège pas l’inventeur de la dépossession, elle donne le droit de déposséder autrui de la libre utilisation d’un savoir qui n’appartient à personne parce que inappropriable et inéchangeable.
Il faut dépasser un droit fondé sur la gestion d’une rareté artificiellement créée.  
Autrefois, le droit aidait à gérer une rareté naturelle de par le faible niveau technologique, aujourd’hui, le droit s’emploie à fabriquer la rareté dans l’abondance technologique. Pourquoi ?
Au nom des besoins de luxe de grands actionnaires, nouveaux seigneurs du capital à la tête d’armées de salariés. En une journée de travail, ces très riches ne peuvent acheter des biens et services aux personnes à très haute teneur en capital humain (travail fait main…). Il leur faut maintenir l’échangisme spécifique à la rareté technologique, pour cela ils nous forcent à l’échange afin de prélever cette plus-value génératrice de profits.
La nature même de l’argent remet radicalement en question tout ce qui relève de la sphère financière et bancaire. L’argent libéré de son support matériel n’est que données comptables relevant du savoir immatériel.
De la centralité de la Terre à la centralité de l’argent, d’une croyance fausse à une autre: les plus grands scientifiques et chercheurs de notre temps acceptent l’existence de problèmes financiers qui ne relèvent pourtant, non pas d’une dette, mais d’un vulgaire racket.
Il faudra bien se rendre à l’évidence que la production intellectuelle met à bas le fondement même de la science économique : la rareté.
 
 


















                                                                             Lire les propositions
 de Libérons La Monnaie

 loi pour le contrôle des banques

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