mercredi 5 août 2015

(3) Si le grand patronat m'était conté









(3) Si le grand patronat m'était conté

 
"On aurait beau distribuer avec largesse, égalité, « justice », jamais aucun accroissement de la richesse sociale n'approcherait du point de rassasiement, tant il est vrai que le désir de tout un chacun est de l'emporter sur tous les autres par l'accumulation des biens."
Thorstein Veblen


                                                                                                                 
Les trois premiers milliardaires français,
 Bernard Arnault, François Pinault, Liliane Bettencourt


Les 1826 milliardaires de la planète s'inscrivent au quotidien dans une compétition inexorable pour la palme de la plus grande fortune, "plus grande" que celles des autres, et non une fortune dont le montant aurait été définie à l'avance comme un but honorable  à atteindre.
 Pour preuve, un milliardaire préfère être le premier avec 50 milliards de dollars que dixième avec 100 milliards... 

Ces enrichis ne courent pas après une valeur absolue mais après une valeur qui autorise la comparaison ostentatoire, on retrouve là cette maladie de l'addiction au jeu, au nom de laquelle, un joueur est prêt à sacrifier ses amis, sa famille, ses enfants, plutôt que de se faire déclasser.
        Le problème, c'est que ces milliardaires ne le restent qu'en faisant s'affronter au quotidien des armées de salariés les unes contre les autres, à coup de gains de productivité qui provoquent bas salaires, chômage, exclusion croissante, malnutrition  et famines...

 
 Dans l'extrait ci dessous, Veblen analyse magistralement cette course à l'honorabilité  
Avec cet article, le troisième de la série Si le grand patronat m'était conté, nous allons à la rencontre d'un grand penseur des 19ème et  20ème siècle: Thorstein Veblen, économiste et sociologue américain (1857-1929).
         Ces extraits sont tirés de son ouvrage paru en 1899, Théorie de la classe de loisir, chapitre 2, pages 22-23-25 (collection Tel chez Gallimard). 
  Bonne lecture  Alain Vidal

  « Du moment ou la propriété fonde l'estime populaire, elle devient non moins indispensable à ce contentement que nous appelons amour-propre. Dans toute société ou chacun détient ses propres biens, il est nécessaire à l'individu, pour la paix de son esprit, d'en posséder une certaine quantité, la même que possèdent ceux de la classe ou il a coutume de se ranger; et quelle énorme satisfaction que de posséder quelque chose de plus!
Or, au fur et à mesure qu'une personne fait de nouvelles acquisitions et s'habitue au niveau de richesse qui vient d'en résulter, le dernier niveau cesse tout à coup d'offrir un surcroît sensible de contentement.
Dans tous les cas, la tendance est constante: faire du niveau pécuniaire actuel le point de départ d'un nouvel accroissement de la richesse; lequel met à son tour l'individu à un autre niveau de suffisance, et le place  un nouveau degré de l'échelle pécuniaire s'il se compare à son prochain.
Dans la mesure ou elle entre ici en question, la fin qu'on se propose en accumulant,c'est d'avoir assez de puissance pécuniaire pour prendre le pas sur les autres. 
Tant que la comparaison lui sera nettement défavorable, l'individu normal, l'individu moyen vivra dans l'insatisfaction chronique et se trouvera mal loti; et quand il aura rejoint ce qui peut s'appeler le niveau pécuniaire normal, cette insatisfaction fera place en lui à une surtension; il n'aura de cesse que l'intervalle s'élargisse encore et toujours entre sa position et ce niveau dit normal.
L'individu qui se livre à la comparaison provocante ne  la trouvera jamais assez favorable: il ne demanderait pas mieux que de se placer plus haut encore.
En tout état de cause, le désir de richesse ne peut guère être assouvi chez quelque individu que ce soit; quant à combler le désir moyen, le désir universel de richesse, il n'en saurait être question. 
On aurait beau distribuer avec largesse, égalité, « justice », jamais aucun accroissement de la richesse sociale n'approcherait du point de rassasiement, tant il est vrai que le désir de tout un chacun est de l'emporter sur tous les autres par l'accumulation des biens. 
Si, comme on l'a parfois soutenu, l'aiguillon de l'accumulation était le besoin de moyens de subsistance ou de confort physique, alors on pourrait concevoir que les progrès de l'industrie satisfassent peu ou prou les besoins économiques collectifs ; mais du fait que la lutte est en réalité une course à l'estime, à la comparaison provocante, il n'est pas d'aboutissement possible […]  
Une comparaison provocante est un procédé de cotation des personnes sous le rapport de la valeur. »

 Combien de temps faut-il aux  trois premiers milliardaires français,
 Bernard Arnault, François Pinault ou Liliane Bettencourt  
pour gagner 33 990 € (l'équivalent du salaire annuel moyen français) ? 

Pour le savoir, cliquez sur le lien pour lancez le chrono !

http://www.journaldunet.com/economie/magazine/gains-des-milliardaires-francais.shtml

                                                                                                                                                         à suivre...



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