Toute servitude nous fait locataires de l’héritage
commun
MANIFESTE
Au delà
de la
Servitude
du Code Noir au
Code du Travail
de l’esclavage et de leurs abolitions,
dans le combat contre toutes les
servitudes,
le collectif Au delà de la Servitude
œuvre au dépassement des statuts
qui subordonnent l’intérêt général à
des intérêts privés.
Toute servitude s’accompagne inéluctablement
du contrôle,
par une minorité, des savoirs et
savoir-faire
qui appartiennent au patrimoine de
l’humanité.
Au passé comme au présent, la
recherche de la rentabilité pour le
profit
a été et demeure le terreau des
discriminations, de la xénophobie et du racisme,
L’objectif étant de diviser afin d’empêcher l’extension des
solidarités de base.
Le premier des droits de l’homme,
celui de produire pour le bien commun,
exige la libre circulation de l’héritage
immatériel
de savoirs et
savoir-faire accumulés depuis l’aube de l’humanité.
De la résistance à
l’esclavage à la résistance à la condition salariale, un même fil conducteur
De Spartacus à la Commune de Paris, en
passant par la résistance noire à l’esclavage, on relève une volonté d’échapper
à une forme de travail dont la finalité est le profit d’un maître ou celui d’un
actionnaire. L’organisation
démocratique d’une société commence par
l’affirmation du droit des peuples à décider des productions matérielles
et culturelles au nom de l’intérêt général.
Pendant des milliers
d’années, les premières communautés paysannes ont ignoré le verrouillage des
techniques par les brevets. La libre-circulation des savoirs et savoir-faire fondait
les échanges sur le temps socialement nécessaire
à la production des marchandises.
Avec des brevets sur les inventions de l’arc, de
la métallurgie, de l’agriculture, de l’écriture ou de la monnaie, jamais les
techniques et les sciences n’auraient progressé de la sorte.
Après l’invention de
l’esclavage, puis du servage, tout va basculer, les solidarités ancestrales
sont remises en question, l’échange devient inégal. L’esclave, comme le serf, a
le droit de cultiver la terre pour se nourrir à la condition de travailler la plus
grande partie de son temps à enrichir le maître ou le seigneur. L’échange inégal, par la force ou par la
ruse, c’est le vol du travail d’autrui. L’échange
inégal est un paradoxe.
Dans les maquis organisés par les nègres marrons ayant fui l’enfer des
plantations, comme dans les espaces solidaires que sont les coopératives de
production, on retrouve cette volonté de mettre en commun savoirs et
savoir-faire afin que le travail de chacun bénéficie également au groupe. N’étant
plus locataires de l’héritage commun, les hommes retrouvent leur dignité.
Savoirs et savoir-faire sont mutualisés, si bien que le temps auparavant
capturé pour le profit du planteur ou
pour celui des actionnaires, est libéré,
il est consacré à l’intérêt général, éducation, soins…Tout s’inverse quand les
intérêts privés sont subordonnés à l’intérêt général. On passe ainsi du profit
à la prospérité.
Dans les plantations de canne à
sucre, dans les entreprises, la priorité est à la rentabilité. Un esclave insuffisamment
rentable est puni par le fouet, un salarié sera réduit au chômage.
1848, d’une servitude à l’autre,
du Code Noir au Code du travail, de l’esclavage au salariat
De fait, les abolitionnistes mettront en place une réglementation
interdisant l’installation des noirs sur des terres en friches inoccupées. Loi
contre le vagabondage, livret, passeport, amendes multiples. Pour acheter le
timbre du passeport, obligation de travailler comme salariés sur les
plantations des blancs. Les conditions de travail sont les mêmes, mais sans le
fouet.
L’héritage matériel et culturel accumulé pendant des siècles par les
esclaves reste propriété du planteur. Il y a obligation d’utiliser une monnaie
à intérêts privés, une monnaie d’ « endettement » qui limite
drastiquement l’accès à une relative autonomie par l’achat d’un lopin de terre.
Les planteurs, par contre, remboursent leurs
dettes aux banquiers avec les profits réalisés sur le travail des noirs
salariés, approche très particulière du concept d’émancipation …
Ce salariat, c’est celui qui, à
l’époque, se met en place dans toute l’Europe. Sans le travail des salariés, les
actionnaires ne feraient aucun profit.
L'esclavage aboli, l'extension du
salariat n'a fait que moderniser la
servitude en l'adaptant au progrès technique
Au-delà des considérations humanistes de certains, le passage d’un travail
avec outils rudimentaires à l’utilisation de machines rendait impossible le
maintien du producteur-esclave. Les actes de sabotage étaient fréquents sous le régime de l’esclavage.
Une exception, dans des régions où la mécanisation est arrivée tardivement,
comme en Afrique. Ainsi, l’esclavage pourtant aboli par la France en 1848, a
été restauré sur les territoires de la République à partir de 1881, ce fut le
Code de l’Indigénat. Cet esclavage déguisé qu’était le travail forcé, ne fut
aboli qu’en 1946, à cette date, 70 millions de Français sujets de la République
furent concernés.
La société salariale organisant la vente d’une capacité de travail, en
échange d'argent (le salaire),
traite la personne humaine comme une
marchandise. Du marché aux esclaves au marché au travail, qu'on soit vendu ou
qu'on soit éduqué à se vendre, il y a
toujours achat d'une force humaine de
travail.
Et pourtant, notre dignité réside dans la maîtrise de cette force qui est
le fondement de notre personnalité … Avec le salariat, le commerce des êtres
humains s’est généralisé à l’ensemble de la planète. Peut-on espérer des
droits, dits fondamentaux, dans un monde subordonné à des intérêts privés?
Le Code du Travail précise clairement que le contrat de travail constitue « un lien de subordination juridique »
du salarié envers l’employeur.
Le salarié s’engage à abandonner son
libre-arbitre, son autonomie, son pouvoir de décision quant au choix des
finalités de la production, finalités orientées ouvertement vers l’intérêt privé.
Le collectif Au delà de la
Servitude répond à une exigence de globalisation des luttes pour le
dépassement de toutes les servitudes y compris le salariat.
Pas de profit sans salariés, pas de salariés sans
expropriation des petits producteurs indépendants
Petits paysans et
artisans sont inexorablement dépossédés par l’obligation d’utiliser une monnaie
qui « endette ». Une « dette » qui n’est qu’un racket
légalisé au profit du 1% des habitants de la planète qui se sont approprié
ainsi 40% des richesses mondiales
Devenus chômeurs par
expropriation, une seule solution se vendre contre un salaire. Avec le risque
permanent de redevenir chômeur… Chaque
jour, 100 000 chômeurs meurent de faim, assassinés, sacrifiés sur l’autel
du profit, 36 000 000 par an !
Le salariat est une construction sociale récente inventée par les
possédants dans la deuxième moitié du XIXème siècle pour générer les profits bancaires, industriels
et commerciaux. Depuis 150 ans, les crises succèdent aux crises : plein
emploi, chômage, plein emploi… Si les salariés du Nord sont globalement mieux
traités que ceux du Sud, il n’empêche que 80 % des salariés de la planète n’ont
ni droits dans l’entreprise, ni protection sociale. Contrairement à une idée
reçue, ce statut est loin d’être la panacée. Et en Europe, à tout moment, un
salarié qui se croit en sécurité peut se retrouver chômeur…
De même que le planteur choisissait un esclave, appelé commandeur, pour
rentabiliser le travail des autres, les actionnaires nomment PDG un salarié
pour orienter le travail vers le seul profit. Commandeur comme PDG ont des
avantages considérables mais restent subordonnés au maître ou à l’actionnaire.
Le droit n’est pas la liberté
Sans le droit à la
nourriture, au logement, à l’instruction… que sont les Droits de l’Homme ? Quand on perd le contrôle de sa capacité de travail, on perd sa dignité. Un
concept synonyme d’autonomie, de libre-arbitre, d’émancipation, le contraire de
mancipare, celui qui est acheté.
Esclavage, servage salariat, trois statuts avec des droits différents, mais
avec un point commun, la subordination. Subordination au maître, subordination
au seigneur féodal, subordination au seigneur du capital.
Certes, d’un statut à l’autre, un producteur jouira de droits différents,
mais le droit n’est pas la liberté. Un prisonnier, privé de liberté, a des
droits, un PDG a des droits mais il n’a pas la liberté de laisser l’entreprise produire au nom de la prospérité générale au
détriment des actionnaires.
Par contre, l’esprit d’entraide et de solidarité au nom de l’intérêt
général, on le retrouve dans les maquis de
résistants ou dans les coopératives.
Comment faire
appliquer les droits fondamentaux, les droits à la libre circulation des idées
et des hommes, si des intérêts privés subordonnent légalement, limitent, voire
interdisent, ces mêmes droits.
Quelles garanties pour 92% des gens dont les droits garantis par la Constitution, dépendent dans la réalité d’un salaire subordonné aux seuls profits des actionnaires ?
Quelles garanties pour 92% des gens dont les droits garantis par la Constitution, dépendent dans la réalité d’un salaire subordonné aux seuls profits des actionnaires ?
Savoirs et savoir-faire ne
s’échangent pas, ils se transmettent
La liberté, la vraie c’est de disposer de l’héritage
de savoirs et de savoir-faire légué par le travail de nos ancêtres depuis trois
millions d’années. Cet héritage appartient au patrimoine de l’humanité. Il nous
est confisqué sous l’appellation de propriété privée des moyens de production.
Cet héritage, aujourd’hui contrôlé par une minorité, s’il redevenait un bien commun,
nous ouvrirait les portes de la prospérité. Il suffirait de pousser, rien qu’un
peu….
Entre vendeur et acheteur, chacun donne et prend, par
conséquence, l’inventeur ne peut pas vendre son savoir puisqu’il le conserve
intégralement, il ne fait que le transmettre. Par contre, le boulanger perd le
pain qu’il vend. Un savoir peut être utilisé par un nombre illimité de gens
sans que l’inventeur perde son invention.
Contrairement aux biens matériels qui
s’usent et se consument dans leur utilisation, les biens immatériels s’enrichissent
dans leur circulation. Le marché de la
connaissance est un paradoxe, le savoir est inéchangeable car inappropriable.
Les brevets ne sont que des taxes du même type que les
taxes féodales tant décriées. Les brevets ne protègent pas l’invention, ils ralentissent le progrès, ils permettent tout simplement,
par le mécanisme de la taxation, d’enrichir illégitimement l’inventeur au
détriment des utilisateurs. Aucune
invention n’étant possible sans l’utilisation du patrimoine de l’humanité dont
nous sommes tous les héritiers, personne ne devrait être privé des avantages de la
recherche.
Une invention parmi les
autres, la monnaie
Formidable invention, la monnaie immatérielle
appartient elle aussi au patrimoine de l’humanité. Depuis la fin officielle de
la parité-or au siècle dernier, la monnaie relève du seul secteur des services.
Pareille au sang qui transporte l’oxygène dans l’organisme, la monnaie facilite
la circulation des richesses. De même que la rate productrice de sang, ne le
monopolise pas au détriment des autres organes, les banquiers n’ont pas à
conditionner la création monétaire à leurs intérêts privés. La monnaie est le
sang du corps social, c’est notre bien commun à tous.
La monnaie n’est pas une richesse, c’est la mesure des
richesses produites à l’extérieur des banques.
De l’or à l’ordinateur, d’un support matériel à un
support immatériel, cette formidable invention n’a pas à être verrouillée par
un brevet (les taux d’intérêts). Placée sous contrôle citoyen, la monnaie
électronique gratuite à sa création, inaugurera un revenu universel aligné, non
plus sur le temps de travail pour le profit, mais sur des quantités de
productions matérielles répondant aux besoins des populations.
Notre patrimoine mondial en savoirs et savoir-faire
est si riche, les gains de productivité sont tels, que moins de 20 % de la
population mondiale suffirait à produire tous les biens matériels (nourriture
comprise) pour les particuliers, les entreprises et les Etats. 80 % de la
population pourrait ainsi se consacrer à des activités immatérielles. Les
services publics atteindraient une importance et un niveau jamais égalés.
En conclusion
Nous pourrions enfin
vivre la libre-entreprise, la vraie, avec des producteurs librement associés,
utilisant l’héritage immatériel au nom du seul intérêt général, dans le respect
des êtres humains et de l’environnement.
Dans une dynamique de développement de
banques sociales et solidaires, le dépassement du salariat après celui de
l'esclavage et du servage, annoncerait véritablement la fin
de l’Ancien Régime
. Le commerce des êtres humains définitivement
interdit, inaugurerait l’avènement d’une démocratie économique respectueuse
d'un écosystème dont chacun serait tributaire.
Au delà de la Servitude est un collectif partenaire de Libérons La Monnaie
Ils adhèrent au
manifeste Au delà de la Servitude, le soutiennent et le font
connaître
Louis Sala-Molins, a été professeur de philosophie politique à la
Sorbonne et à Toulouse. Ses travaux ont fait connaître le Code Noir dans le
monde entier.
Olivier
Le Cour Grandmaison, maître
de conférences de sciences politiques et de philosophie politique à
l’Université d'Evry-Val-d'Essonne. Spécialiste du racisme d’Etat, il a contribué
à faire connaître le travail forcé, cet esclavage déguisé, inscrit dans le Code
de l’Indigénat sous la Troisième République.
Vous
désirez être informés de nos projets à Nantes et ailleurs, soutenir et signer
le manifeste
au.dela.servitude@gmail.com
loi pour le contrôle des banques
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