dimanche 22 avril 2012

Le crime contre l'homme blanc

Un article  pour le 17 octobre 2002




 
Massacre des Algériens le 17 octobre 1961



Ce que le très chrétien bourgeois du XX siècle 
ne pardonne pas à Hitler,  
 ce n'est pas le crime en soi, 
c'est le crime contre l'homme blanc
 
"Il vaudrait la peine d'étudier cliniquement…les démarches d'Hitler et de révéler au très distingué, très humaniste, très chrétien bourgeois du XX siècle qu'il porte en lui un Hitler qui s'ignore… et qu'au fond, ce qu'il ne pardonne pas à Hitler, ce n'est pas le crime en soi, le crime contre l'homme, ce n'est pas l'humiliation de l'homme en soi, c'est le crime contre l'homme blanc… et d'avoir appliqué à l'Europe des procédés colonialistes dont ne relevaient jusqu'ici que les arabes d'Algérie, les coolies de l'Inde, et les nègres d'Afrique"                                                          
  (Aimé Césaire, écrivain, poète antillais)
         
            Déportation, camp de concentration, travail forcé, torture institutionnalisée, massacre, extermination: pour les européens victimes des procédés colonialistes des nazis ou pour les "indigènes" victimes du colonialisme des européens...où est la différence? En Algérie, pour exterminer les familles fuyant les massacres, et réfugiées  dans les grottes, le général Bugeaud ordonnait le gazage par "enfumades", Hitler, progrès technique aidant, préférait les chambres à gaz…Martyr des habitants d'Oradour-sur-Glane enfermés et brûlés vifs par les SS dans l'église de leur village, ou martyr de ces paysans maghrébins enfermés et brûlés vifs par des soldats français dans la  mosquée de leur village...où est la différence? Les atrocités  du nazisme et du stalinisme sont dans les manuels d'histoire…mais à l'école on tait encore les crimes d'une certaine colonisation.
           Il a fallu attendre mai 2001 pour que la France reconnaisse  la traite et l'esclavage comme crime contre l'humanité, mais sans que soit mentionnés ni la déportation ni le principe de réparation concernant, entre autres, les 12 millions d'africains déportés en Amérique dans ces camps de concentration que furent mines et plantations. Combien de temps encore pour qualifier le colonialisme de crime contre l'humanité?
        Au XVIII siècle, en France, des voix s'élevaient déjà contre "les droits du seul homme… blanc". Or, bien après la Déclaration des Droits de l'Homme et  l'abrogation de l'esclavage, Jules Ferry, apôtre de la colonisation, déclare à l'Assemblée Nationale, le 25 juillet 1885:"La consommation européenne est saturée: il faut faire surgir des autres parties du globe d'autres consommateurs…Si la Déclaration des Droits de l'Homme a été écrite pour les Noirs de l'Afrique équatoriale, alors de quels droits allez-vous leur imposer les échanges, les trafics ? Ils ne vous appellent pas…Les races supérieures ont un droit vis à vis des races inférieures. Elles ont le devoir de civiliser les races inférieures… La politique coloniale est fille de la politique industrielle."
          Et Clémenceau, de l'interpeller: "Regardez l'histoire de la conquête de ces peuples que vous dites barbares, et vous y verrez la violence, tous les crimes déchaînés, l'oppression, le sang coulant à flots, et le faible opprimé, tyrannisé par le vainqueur. Voilà l'histoire de notre civilisation…Non, il n'y a pas de droit des nations dites supérieures contre les nations inférieures… n'essayons pas de revêtir la violence du nom hypocrite de civilisation". A l'époque, un fort courant anticolonialiste traversait l'opinion publique. 
  
                                                  La Commune de Paris: la Semaine sanglante


          Après l'écrasement de la Commune, l'histoire se met au service d'une "religion de la patrie, une religion qui n'a pas de dissident" (Jules Ferry, 10 août 1881). L'école devient un formidable outil d’endoctrinement de la jeunesse, un formidable outil de propagande au service des puissances d'argent. Endoctrinés dès l'enfance, des générations de soldats obéiront aveuglement aux ordres donnés par impuissance de conscience. Ainsi enseignée, l'histoire  masquera ou justifiera les pires crimes du terrorisme d'état. Véritable zone de non-dits historiques, une culture coloniale sous-jacente alimente encore aujourd'hui  racisme et néo-colonialisme.
            Dans les manuels scolaires, les armées françaises n'envahissent pas, ne pillent pas, ne torturent pas, non! la France ne fait que des explorations, que des  découvertes. La France étend son influence, elle s'installe… L'armée fait des conquêtes, elle pacifie. La conquête, c'est la civilisation et l'invasion, la barbarie. Préférer conquête à invasion, c'est camoufler par les mots le crime perpétré par les armes. Masquer ces atrocités, c'est alimenter la lepénisation des esprits après que le racisme ait légitimé le colonialisme. Au regard des continents envahis et occupés par des européens "sans-papiers", mais armés de fusils et de canons, Aimé Césaire rappelle que "l'Europe est comptable devant la communauté humaine du plus haut tas de cadavres de l'histoire".
           Que la France déclare  le colonialisme  crime contre l'humanité. Qu'un mémorial soit édifié à la mémoire des victimes qui, bien malgré elles, ont contribué à la "formidable supériorité économique" des pays du Nord. Qu'une journée de commémoration devienne une date à résonance universelle. Que soit reconnu le principe de réparation comme cela est pour les victimes du nazisme. Mais pour que cette compassion ne masque pas émotionnellement un questionnement essentiel, encore faut-il que tout cela s’accompagne d’un enseignement “ déjulesferrysé ” de l’histoire qui aide les enfants à comprendre comment des gens "sans histoires" deviennent des bourreaux. D'un enseignement de l'histoire qui aide à comprendre ce qu'est le terrorisme d'états… voyous.
              Pour les enseignants, c'est un devoir envers les enfants.
                                                                      Alain Vidal, instituteur à Nantes ,17 Octobre 2002


Lire les propositions de Libérons La Monnaie

 loi pour le contrôle des banques

1 commentaire:

Anonyme a dit…

C'est vrai, ce que vous écrivez là,
c'est du passé mais ça n'est pas
reluisant. Que faire? Si on remonte
plus loin, les civilisations con-
quérantes (elles ont eu toutes les
couleurs de peau) ont toujours fait
les mêmes choses. Alors...